Plan de reconquête et de transformation du tourisme

Durée 5 ans

Jean-Baptiste Lemoyne secrétaire d’État chargé du tourisme

Alain Griset ministre chargé des PME

Objectif : consolider la place de la France comme 1ère destination touristique mondiale tout en

accompagnant la transformation du secteur (tourisme durable, numérisation).

5 grands axes thématiques :

® améliorer la formation et l’attractivité des métiers du tourisme ;

® valoriser nos patrimoines naturels et culturels ;

® assurer la montée en qualité de l’offre touristique ;

® favoriser le développement des infrastructures et des transports ;

Enfin, encourager l’innovation et la numérisation du secteur

Le plan de reconquête et de transformation du tourisme pourra également comporter des mesures

transversales structurantes pour l’ensemble du secteur :

® Comment encourager et structurer une filière du tourisme d’affaires ?

® Comment soutenir les acteurs du tourisme rural ?

® Quelles mesures en faveur du thermalisme ?

® Comment assurer la promotion de la Destination France dans le contexte post-covid ?

1. Axe 3 : Montée en gamme de l’offre touristique

1.1.Comment améliorer la qualité de l’offre touristique, notamment en matière

d’hébergement-restauration ?

® Comment améliorer la qualité de l’offre touristique en général et en matière d’hébergement et

de restauration en particulier (immobilier, accueil des clientèles, nouveaux services, durabilité

etc.) ?

® Quels segments de l’offre doivent être visés en priorité (hôtellerie, auberges collectives, meublés

touristiques, résidences etc.) ?

® Quelles modifications d’ordre règlementaire seraient à même de faciliter les activités dans le

secteur du tourisme ?

1.2.Comment favoriser les investissements dans le secteur ?

® Quels types d’outils publics devraient être améliorés ou créés pour favoriser l’investissement

touristique (subventions, prêts et garanties de prêts, prise de participation, foncière immobilière,

ingénierie, etc.) et dans quels segments ?

® Parmi les outils proposés par Bpifrance et la Caisse des Dépôts (dette, fonds propres, quasi fonds

propres), quels sont ceux qu’il conviendrait de renforcer ou d’aménager ?

® Comment orienter l’épargne privée vers les investissements touristiques ?

® Comment stimuler l’investissement en particulier dans les territoires ruraux et ultra-marins ?


Observations UMIH Guadeloupe :

M. Le Ministre,

M. Le Secrétaire d’État,

Mmes et Messieurs les Parlementaires,

Mmes et Messieurs en vos grades et Qualités,

Le thème de l’axe 3 qui nous est soumis est celui de la « montée en gamme » de l’offre

touristique.


« Montée en gamme » : l’expression est séduisante, évoque l’ambition : mais qui voudrait

s’engager dans une voie contraire ? Dans la voie de la régression ! Personne !

Les expressions à la mode « tourisme durable, bleu, vert » comme « montée en gamme » sont

des manoeuvres d’évitement du vrai sujet : celui de la définition d’objectifs chiffrés, financés et

programmés dans le temps. Celui d’une politique, au sens noble du terme.

La première question qui se pose, avant d’évoquer la nécessaire répartition des responsabilités,

est celle de la pertinence de la question : pourquoi évoquer la « montée en gamme » de l’offre

touristique si la demande touristique sollicite autre chose qu’une « montée en

gamme » dont l’intérêt est loin d’être évident ?

Est-ce que nos futurs visiteurs, locaux comme nationaux ou internationaux recherchent

réellement une « montée en gamme » sous une forme quantitative, voire même qualitative ?

J’aurais plutôt tendance à répondre NON ! Le visiteur est plutôt à la recherche d’expériences

nouvelles, de contact avec la nature, de mobilités douces, d’une restauration inspirée des

traditions locales, de convivialité, d’un environnement en rupture avec l’univers urbain. Le

qualitatif, l’alternatif, la déstandardisation, deviennent des valeurs majeures pour le visiteur

contemporain.

La priorité ne doit donc pas être la « montée en gamme » de l’offre, mais celle de la

création des conditions pour que l’offre existante s’adapte par elle-même à cette nouvelle

demande et pour qu’une nouvelle offre se crée en réponse directe à cette nouvelle

demande.

La question se pose immédiatement : à qui revient la responsabilité de créer les conditions de

cette nouvelle offre répondant à la demande contemporaine ?

Rien de neuf en la matière : aux pouvoirs publics de remplir leurs missions publiques, aux

investisseurs et exploitants privés de s’engager économiquement au sein d’un environnement

aménagé par les pouvoirs publics.

Aux pouvoirs publics de remplir leurs missions publiques :

- Mettre en oeuvre un code du tourisme rénové sur les canons de la demande du 21ème siècle ;

- Permettre aux professionnels des industries touristiques de participer réellement à l’élaboration des

P.L.U. (Plans Locaux d’Urbanisme) ;

- Investir dans les mobilités douces, notamment par la création d’importants réseaux de pistes

cyclables, par la piétonnisation des espaces urbains adaptés, par la végétalisation des espaces

publics ;

- Créer et aménager de nouveaux espaces fonciers, en faire des espaces structurés pour accueillir les

hébergements et équipements destinés aux visiteurs locaux ou en mobilité, en mutualisant au mieux

les services collectifs qui peuvent l’être ;

- Réformer l’organisation institutionnelle actuelle des collectivités locales : la création des offices du

tourisme intercommunaux a bouleversé les équilibres habituels, et rend nécessaire la mise en place

d’une nouvelle répartition des rôles : les offices du tourisme intercommunaux doivent composer la

colonne vertébrale des comités régionaux de tourisme, et les professionnels des industries

touristiques doivent piloter les comités régionaux de tourisme à parité avec les élus, issus des

communautés de communes ou d’agglomérations, et du Conseil régional ;

- Redonner la primauté au Code du tourisme et mettre fin aux interférences inappropriées du Code

général des collectivités territoriales dans le Code du tourisme ;

- Réformer pour les Outre-mer le régime de la taxe affectée de séjour selon deux vecteurs : modifier

le mode de perception de la taxe ; créer une contrainte législative réservant à l’investissement public

structurant l’emploi de 70% de la taxe affectée collectée via les services de l’Etat ;


- Traiter les professionnels de l’hébergement temporaire enregistrés au registre du commerce et des

sociétés sur un pied d’égalité, aux plans administratif, réglementaire, social et fiscal, avec les loueurs

en meublé fournissant de l’hébergement meublé temporaire.

Aux investisseurs et exploitants privés de s’engager économiquement au sein d’un

environnement aménagé par les pouvoirs publics, et de participer de manière continue à

l’élaboration des politiques publiques relatives aux industries touristiques :

- Sans foncier disponible, et sans foncier balisé et aménagé par les pouvoirs publics, il n’y

aura pas de développement rapide de l’emploi dans les industries touristiques, ni de

développement à long terme ;

- Sans concentration raisonnable des hébergements destinés aux visiteurs, il n’y aura pas

d’amélioration de la plus-value nécessaire pour attirer les investisseurs ;

- Sans concertation entre, investisseurs et exploitants privés, et pouvoirs publics, les industries

touristiques françaises seront stabilisées, c’est-à-dire immobilisées, ce sera une économie

de rente, sans ambition et sans création massive d’emplois. Ce sera le choix de l’artisanat

touristique et du déclin, tandis que nos compétiteurs internationaux poursuivront leurs

démarches de développement ;

- Pour mémoire, le Club Méditerranée est à 100% chinois ; le N°2 français de l’hôtellerie (le

groupe LOUVRE HOTELS) est à 100% chinois ; le N°1 français de l’hôtellerie (le groupe

ACCOR HOTELS) subit régulièrement les assauts d’investisseurs étrangers, dont chinois ;

la Compagnie des Alpes, filiale de la Caisse des dépôts et consignations, qui dirige 10

domaines skiables français (dont Tignes-Val d'Isère, Méribel, La Plagne, Le Grand Massif,

etc) et contrôle 13 destinations de loisirs (dont le Parc Astérix, le Futuroscope ou le Musée

Grévin), a mis en oeuvre dans la station de ski Thaiwoo son 1er contrat en Chine en 2015 et

a ouvert une filiale en Chine, en vue notamment des Jeux olympiques d'hiver de 2022 ;

l’ambition française est-elle de développer nos industries touristiques, et l’emploi qui

va de pair ? ou de les vendre à la suite de leur déclin ?

- Sans participation réelle et continue des professionnels à l’élaboration des politiques

publiques, nos industries touristiques nationales déclineront, lentement mais sûrement.

En conclusion :

Aujourd’hui, la « compétence tourisme », expression administrative archaïque qui évoque, très

mal et très timidement, la responsabilité des politiques de développement de l’emploi dans les

industries touristiques, se partage entre l’État, la région, le département, les communautés de

communes ou d’agglomération, et les communes. Ces empiètements de fausse responsabilité

sont contre-productifs et conduisent assez souvent à des actions désordonnées entre comité

régionaux du tourisme et offices intercommunaux. Sans compter que les offices du tourisme

communaux ont été maintenus, contre la volonté initiale du législateur, et transformés en

« bureaux d’information touristique » inutiles car très peu fréquentés par les visiteurs, qui leur

préfèrent la consultation sur internet, plus riche en informations précises, détaillées et

actualisées.

L’objectif de « montée en gamme » concerne donc, en premier lieu, une remise en ordre

des structures publiques décisionnelles relatives aux industries touristiques, et, en second

lieu, le redémmarage des investissements publics en équipements publics structurants,

investissements qui profitent tout autant, sinon plus, aux populations locales qu’aux

visiteurs.

L’objectif de « montée en gamme », s’il vise l’augmentation de la fréquentation

touristique, peut aussi être parfaitement vain. En elle-même, l’augmentation de la

fréquentation touristique, si elle n’est pas génératrice d’emplois, et donc de chiffres d’affaires

permettant de financer ces emplois, constitue un coût pour la collectivité dont l’intérêt est très

discutable, voire contestable. Seules sont durables les activités créatrices d’une richesse

suffisante pour rémunérer des emplois locaux.

Soulignons enfin que l’évolution des besoins des populations des pays développés fait que

la population locale est en réalité beaucoup plus consommatrice, en volume, des loisirs et

équipements locaux que la population des visiteurs extérieurs. Il y a donc les

consommateurs endogènes de loisirs et d’équipements, et des consommateurs exogènes.

Les premiers sont les consommateurs les plus fréquents, et les moins dépensiers ; les

seconds sont les consommateurs les moins fréquents et les plus dépensiers. Mais tous ces

consommateurs doivent se sentir bénéficiaires d’une politique qui n’est plus, comme autrefois,

une politique exclusive des industries touristiques, mais qui doit devenir une politique de la

qualité de la vie pendant les temps libres, qui doit satisfaire toutes les populations, sans

exclusive.

Bien d’autres choses encore seraient à décliner, M. Le Ministre, M. le Secrétaire d’État, mais

nous avons déjà été trop longs, nous vous prions de nous en excuser, et nous sommes à votre

disposition, dans l’intérêt collectif de la France, c’est-à-dire de la métrople et des Outre-mer,

pour poursuivre cet échange à votre convenance.

Le 06/10/2021

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