Lundi 4 octobre 2021
Monsieur le Président de la SEMPAT,
Monsieur le Président du CODIR de la CARL,
Vous cumulez les fonctions :
- D’Avocat, inscrit au barreau de Pointe-à-Pitre, et ex bâtonnier,
- De Maire de la commune de Saint-François,
- De Président du comité de direction (CODIR) de l’office du tourisme intercommunal (OTI) de
la communauté d’agglomération de la Riviera du levant (CARL),
- De 3 ème Vice-président du conseil régional Guadeloupe,
- De Président de la société d’économie mixte patrimoniale (SEMPAT) de Guadeloupe.
C’est être chargé de nombreuses fonctions représentatives.
Loin de nous la pensée de porter un quelconque jugement sur la Vie de chacun d’entre nous, que
nous assumons librement ou par contrainte plus ou moins consentie au cours de notre destinée.
Le bon sens populaire de nos ancêtres, et l’expérience qui parfois permet d’accéder à plus de
sagesse préviennent et enseignent cependant l’adage « qui trop embrasse mal étreint ».
Nous espérons que chacun d’entre nous puisse éviter ce piège phagocytaire dans une vie brève et
que cela lui permettre d’accomplir l’essentiel …
Celui qui surmonte et surnage au tourbillon tumultueux d’une vie civile trop remplie, et garde la
sérénité nécessaire au traitement lucide et serein des événements sans succomber à la fébrilité
ambiante, mérite à l’évidence le respect de ses semblables.
En tant que Président de la SEMPAT, vous avez déclaré sur la chaîne de télévision Guadeloupéenne
Canal 10, le 29/09/2021, suite à Plénière du Conseil Régional, dans son hémicycle (je vous cite
intégralement) :
« Il est important, en tant que Président de la SEM Patrimoniale de contribuer à récupérer l’outil
touristique qu’est l’hôtel « Pierre et Vacances » qui allait être vendu à la découpe et la SEM
patrimoniale rachète la structure pour la remettre en gestion à Pierre et Vacances et ce sont 150
emplois qui sont préservés en phase directe, sans compter les emplois en phase indirecte. J’entends
là, l’amère expérience avec l’hôtel « Manganao », et de l’hôtel « l’Anse des Rochers » du groupe
Anchorage où c’est parti à la découpe et où l’hôtel a dû être fermé. Donc c’était important pour nous
de pouvoir dire aujourd’hui que nous sommes véritablement au service du développement
économique et touristique. Vous n’avez qu’à voir le projet du Royal Key au Moule, le projet de l’hôtel
Saint Georges à Basse-Terre (correction : St Claude), le projet également au niveau du Salako qui
connait quelques déboires, et bien c’est pour dire que nous avons besoin de préserver cette structure
économique et touristique et les emplois des Guadeloupéens qui sont attachés pour que ça ne se
vende pas par appartement, sans compter d’autres projets que nous sommes en train de réaliser sur
toute la CARL mais également sur l’ensemble du territoire de la Guadeloupe. Oui les actions
s’imposeront d’elles-mêmes dans la mesure où effectivement lorsque nous sommes attachés avec les
partenaires sociaux les consulter, les rencontrer, pour communiquer avec eux pour qu’ils touchent du
doigt l’intérêt de la SEM Patrimoniale pour préserver leurs emplois. Pour nous c’est très important en
tant que responsable public de pouvoir faire en sorte que sa population n’ait pas à pâtir de la
spéculation immobilière puisque la pression de ladite spéculation fait que précisément on a besoin de
cet outil qu’est la SEM Patrimoniale pour un petit peu contenir cette spéculation pour que les outils
touristiques, les outils économiques, ne partent pas parce que nous avons besoin de ces emplois pour
notre population.
Cela amène l’UMIH Guadeloupe à émettre plusieurs observations :
1) l’UMIH Guadeloupe est présente au sein du Comité de direction de l’OTI (CODIR) de la CARL avec
un titulaire et un suppléant. Alors que vous déclarez «nous sommes attachés avec les partenaires
sociaux les consulter, les rencontrer, pour communiquer avec eux » nous n’avons JAMAIS été
informés de ces projets - même éventuels - et nous n’avons JAMAIS été consultés pour en
débattre. Pas plus d’ailleurs que nous n’avons été informés d’un projet de développement
touristique déposé récemment par la CARL (en lien avec l’Institut National des Études
Territoriales(INET)) et qui sur 80 projets déposés aurait été retenu avec 17 autres projets. Peutêtre
considérez-vous, en tant que Président, et avec les membres élus de la CARL, que ces sujets
ne concernent pas les membres du CODIR, que ceux-ci ne sont pas des partenaires sociaux et
professionnels dignes d’être consultés, qu’ils ne sont là qu’en tant que figurants pour donner
l’illusion d’une concertation, et que les élus du Conseil Régional avec leur outil, la SEM
Patrimoniale, peuvent décider seuls dans une conception démocratie toute relative ?
Ajoutons encore que la ville du Gosier communique en date du 1er octobre un document intitulé
« L’OTI MET LES VILLES DE LA CARL À L’HONNEUR »
(Qui dans le texte fait référence abusivement à une réunion qui se serait tenue le 29 octobre 2021)
Qui n’a jamais été débattu et communiqué par les membres de l’OTI, ce qui est bien cavalier.
Nous convenons, tout comme vous, que le devenu des hôtels « Manganao », et «Anse des Rochers »
du groupe Anchorage où la vente à la découpe a entrainé la fermeture de l’établissement, est
regrettable. Tout comme a été regrettable la vente à la découpe de l’annexe hôtelière de La Vieille
Tour (82 chambres) ou encore les 191 chambres du « Marissol » mitoyen de l’hôtel Fleur d’Épée, des
chambres de l’annexe de l’hôtel Arawak et l’abandon de l’hôtel Callinago.
Je citais déjà le 19/11/2009 2009, nombre de fermetures d’établissements que je rappelle pour
mémoire :
« Kaye’là, Port-Marina, Méridien, Plantation Ste Marthe, Anchorage-Anse des Rochers, Callinago,
Marissol, Domaine de Malendure, ceux de la commune du Moule, pour ne citer que les principaux »
Vous pouvez, à ce sujet, vous reporter si vous le souhaitez, à l’interview que j’avais accordé le
19/11/2009 au journaliste M. DANIK.IBRAHIM à partir du
lien : www.caraibcreole.com <http://www.caraibcreole.com>
Dans cet interview, je soulignais déjà (et je vous cite quelques extraits dont vous pourrez juger de la
pertinence éventuelle aujourd’hui, 12 ans plus tard) :
1)L’hôtellerie n’est qu’un maillon de la chaîne.
Certes sans hôtels, le trafic aérien baisserait fortement, au moins une Cie aérienne disparaîtrait
très probablement pendant que les autres Cies diminueraient le nombre d’avions en services et
le nombre de sièges offerts. Cela pourrait influer sur la rentabilité des Cies aériennes et sur les
prix des billets d’avion.
Vous l’aurez compris, tous ceux qui vivent du tourisme pâtiraient de cette situation.
Comme pour un hôtel, quand les recettes baissent, il faut pour survivre et traverser la crise,
réduire les dépenses en attendant des jours meilleurs, d’où fermetures, (parfois plusieurs mois
pour de grosses structures), révision des charges de personnels (licenciements économiques ou
chômage partiel, voire total, adaptation des contrats de travail à l’activité réelle, recherche de
critères d’amélioration de productivité, etc...). C’est ce qui a été fait jusqu’ici dans nombre
d’établissements.
Ajoutons que les touristes d’aujourd’hui veulent de la sécurité, de la sérénité, de l’hygiène, du
confort, sinon ils vont ailleurs puisque l’offre est mondiale et que tous les pays dépensent
beaucoup d’argent pour attirer les touristes.
2) En termes d'emploi, que représente l'hôtellerie aujourd’hui ?
Réponse : en moyenne 1 emploi pour trois ou 4 chambres dans l’hôtellerie non classée ou de zéro
ou 1 étoile, 1 emploi pour 3 chambres en 2 *, 1 emploi pour 2,5 chambres en 3 *, 1 emploi pour
2 chambres en 4 * et parfois 1 emploi par chambre en 4 * luxe et au-delà.
Aujourd’hui, l’hôtellerie, c’est plus de 2.000 emplois CDI et 1.000 emplois “Extras et Saisonniers”.
Le tourisme dans son ensemble c’est 15.000 emplois déclarés.
4) Combien d'hôtels ont vraiment fermés ?
On peut estimer depuis cinq ans que 2.000 chambres sur 6.000 ont disparu, bien qu’il soit difficiles
de connaître les Gîtes qui se créent ou disparaissent.
C’est plus simple pour les hôtels. Citons pêle-mêle ceux qui sont fermés ou détruits :
Kaye’là, Port Marina, Méridien, Plantation Ste Marthe, Anchorage Anse des Rochers, Callinago,
Marissol, Domaine de Malendure, ceux de la commune du Moule, pour ne citer que les principaux.
5/ Est ce que l'État, comme cela avait été dit, a soutenu (plan corail) la relance de l'activité
hôtelière ?
Sous quelles formes ?
Réponse : Question délicate. La “visibilité” du plan Corail n’est pas évidente en termes d’aides.
En revanche, en termes d’écoute de la Trésorerie et des Services Fiscaux, il faut saluer les efforts
qui sont faits.
6. / Côté syndical ; il est souvent dit, que les Hôteliers bénéficient de nombreuses aides, (État,
Région) où est la vérité ?
Réponse : La vérité, c’est qu’il est bien dommage que ceux qui diffusent de la désinformation
fassent ainsi la preuve de leur absence de connaissances économiques. Donnons quelques chiffres
En Europe, l’hôtellerie a 30 à 32 % de masse salariale sans aides.
En Guadeloupe, c’est en moyenne 40 à 50 % avec aides. S’il n’y avait pas d’aides, la masse
salariale serait de l’ordre de 65 % et les hôtels fermeraient définitivement.
En Europe, les Excédents Bruts d’Exploitation (le bénéfice à quelque chose près) est de l’ordre de
20 à 30 %. Dans la Caraïbe, il dépasse souvent 50 %. En Guadeloupe, l’EBE se situe entre + 5 %
et – 10 %, c’est-à-dire que beaucoup d’entreprises sont virtuellement en dépôt de bilan, d’où les
fermetures constatées, parfois définitives.
En réalité, ces “aides” sont des soutiens à l’emploi qui évitent le chômage sans elles. Elles profitent
d’abord aux salariés jusqu’à ce que l’entreprise jette l’éponge face au manque de productivité ou
aux revendications disproportionnées à la réalité économique.
7. Les hôtels transformés en résidences de standing est-ce la solution ?
Réponse : La solution, c’est l’esprit d’entreprise de tous les salariés de l’entreprise et pas
seulement de quelques membres de la direction. C’est comprendre les enjeux du tourisme et
s’impliquer dans sa réussite à tous les niveaux, y compris dans la population et chez nos élus.
Quand je vais en Dominique on me dit avec un sourire chaleureux : “Welcom in Dominica”. Je
répète : Propreté, hygiène, embellissements, respect de l’environnement, accueil chaleureux,
prise en compte de nos visiteurs : culture, gastronomie, animations...
Le tourisme, c’est un métier qui nécessite décisions et actions, ça ne s’improvise pas.
8. Tout près de nous, deux exemples différents d'activités hôtelières ; St-Martin et St Barth,
comment expliquer les différences avec la Guadeloupe ? Pourquoi à St Martin ça va moins bien ?
Réponse : Allez en partie Hollandaise à St Martin et vous comprendrez pourquoi il y a autant de
navires de luxe et de jets privés, alors que la partie Française est à l’état de friche ou d’abandon
bien souvent.
Entreprendre est plus facile en partie Hollandaise. Les contraintes administratives ne sont pas les
mêmes (contraintes Européennes en partie française). Tout est tourné là-bas pour que l’entreprise
réussisse et non pas pour la tondre.
Savez-vous combien coûte le m3 d’eau à St Martin partie Française ?
Connaissez-vous le montant des taxes de Séjour réclamés aux hôteliers à St Martin en partie
Française ?
Le Dollar est pris pour un Euro en partie Hollandaise...
Sur ce sujet je vous conseille de vous tourner vers mes collègues de St Martin
9. Les syndicats, vous présentent souvent (M. Vion) comme un"patron de choc" qui ne lâche rien.
Vous confirmez cette image ?
Réponse : Je pense que l’économie crée le social et non l’inverse. Les fruits de la croissance
doivent permettre le développement de l’entreprise et de ses emplois. Confondre le bénéfice et
le CA est peut-être la raison pour laquelle tant de syndicalistes ne se risquent pas à être des
entrepreneurs ?
Montrez-moi ceux qui, parmi eux, ont créés leurs entreprises et si leurs salariés éventuels auraient
plus de salaires et d’avantages que dans l’hôtellerie ?
La “richesse” est créée dans une entreprise par le travail et par toute l’équipe au travail.
Je crois que diriger, c’est d’abord penser à tous ceux avec qui on travaille, ce n’est pas faire du
paternalisme, se faire “aimer” sans se soucier du lendemain, en s’en lavant les mains.
1O. Quel-est l'avenir de l'activité hôtelière en Guadeloupe, est-elle encore RENTABLE ?
Réponse : Tout dépend des Guadeloupéennes et des Guadeloupéens. S’ils veulent la réussite de
leur économie et de leur tourisme avec réalisme, alors ce sera la réussite pour tous, car la
Guadeloupe a un potentiel de réussite touristique incontestable. Bien sûr cela demande
explications, concertation, efforts et persévérances. Quand je regarde la jeune génération des
diplômés, d’une jeunesse capable, prometteuse, pleine d’avenir, je constate souvent qu’elle ne
veut pas revenir travailler en Guadeloupe. Interrogez les pourquoi et vous découvrirez comment
nous pouvons réussir.
11. devant La Ministre ML Penchard, vous avez fait un discours , serez-vous mieux entendu
qu'avec Y. Jego?
Je crois à la Guadeloupe et je dirais toujours ce que je pense “bon” pour la Guadeloupe.
Madame Penchard est une Guadeloupéenne qui sait, même si elle en venait à ne pas partager
mes propositions, que je suis sincère, et que ce qui est bon pour la Guadeloupe est bon pour la
France.
Nicolas VION, le 19/11/2009
Pardonnez-moi, M. Le Président, la longueur de ces extraits, mais je reste persuadé qu’il est
grand temps de ne plus se complaire dans un conformisme qui nous condamne à un devenir
fatal : il faut bousculer des habitudes regrettables comme l’absence de parité réelle,
l’acceptation de représentativités virtuelles, une consultation et une invitation au dialogue de
façade.
La réponse à cette question m’intéresserait :
« Qu’est-ce qui a changé en positif depuis 2009 ? »
Y-a-t-il une courbe démographique croissante ? NON
Y-a-t-il eu une évolution fondamentale de l’économie et de la gouvernance qui ait conduit à
moins de pauvreté, plus de logements, moins de chômage, moins d’assistanat ? NON
Y-a-t-il eu plus de retour sur la terre natale de diplômés pour s’impliquer dans la gouvernance ?
NON
Y-a-t-il eu de façon significative plus d’investissements structurants attractifs pour nos
visiteurs ? NON
Les taxes affectées ont-elles été utilisées à l’investissement plutôt qu’au fonctionnement ? NON
Pourquoi ?
Il est grand temps de choisir, de décider et de vouloir réussir !
2) Tout ce qui précède témoigne des difficultés économiques réelles du secteur hôtelier et cela aurait
probablement pu être évité par une acceptation au dialogue avec les professionnels investisseurs
et porteurs d’emplois. Ce n’a pas été le cas depuis des années. Dont acte.
Vouloir, pour les acteurs publics, préserver les emplois locaux, c’est vertueux comme le devrait
être tout acte politique au sens étymologique du terme.
Cependant n’est-il pas concevable que, s’agissant pour une SEM Patrimoniale de l’utilisation des
deniers des contribuables, il soit rendu compte et justifié des deniers dépensés ?
Soyons plus explicites : lors du transfert de propriété du foncier et des murs de l’ex Karibéa de 270
chambres, constitué des hôtels Clipper – Salako – Prao, quelle information a été donné aux
membres du Comité Économique, Social et Environnemental Régional (CESER) sur le montage
financier à partir de deniers publics ? Des membres ont pourtant sollicité cette information sans
l’obtenir.
Pourtant le CESER est informé par l’exécutif Régional d’avoir à donner, entre-autre, son avis sur le
Budget régional et sur le plan pluriannuel d’investissement régional (PPI) à défaut d’être vraiment
consulté sur le fonds car ne sont pas respectés, assez souvent, les délais nécessaires à une analyse
réelle.
Pourquoi n’avoir pas accepté une information transparente sur l’utilisation des deniers publics par
la SEM Patrimoniale, et pourquoi ne pas avoir consulté - a minima - les instances collégiales
concernées comme le CODIR dans lequel la représentation professionnelle aurait pu donner son
avis au titre de son analyse économique et de sa viabilité estimée ?
3) Ce sujet méritait d’autant plus d’être débattu qu’outre les investissements passés occultes réalisés
par la SEMPAT dans le cadre de l’opération Karibéa, le montage n’était pas viable, puisque le
gestionnaire n’a pu s’acquitter dans le temps des loyers importants demandés par la SEMPAT. En
effet, n’importe quel professionnel hôtelier exploitant vous confirmera que fixer un loyer mensuel
de 100.000 € (1,2 M€/an !) pour 270 chambres, ce qui revient à un loyer mensuel de 370
€/chambre est difficile à assumer compte tenu de la saisonnalité de l’activité hôtelière. Le plan
montagne mis en place par le gouvernement a pris en charge - pour la montagne - les coûts fixes
des structures touristiques sans condition de chiffre d’affaires (CA) pendant la crise sanitaire, mais
il n’en n’a pas été de même dans les Outre-mer, particulièrement en Guadeloupe. Dans ces
conditions, le gestionnaire ne pouvait pas, comptablement, s’acquitter de tels loyers avec une
fréquentation de clientèle le conduisant à ne louer qu’une chambre sur trois pendant la période
de crise sanitaire, ce qui mathématiquement triplait le loyer de la chambre occupée. Si la SEMPAT
avait été vraiment préoccupée de la sauvegarde des emplois, elle aurait selon nous dû, en premier
lieu, aménager ses loyers pour qu’ils soient tolérables et ne conduisent pas le gestionnairelocataire
à déposer son bilan.
Par ailleurs, pouvez-vous nous préciser, s’agissant de la dépense publique, si la SEMPAT a envisagé
de réaménager les loyers du repreneur, si elle a prévu d’effectuer sur les bâtiments des travaux à
la charge du bailleur (étanchéité, malfaçons décelées, …) ?
Nous vous faisons part du point de vue de l’organisation syndicale patronale du secteur des CHRD
(Cafés, hôtels, Restaurants, Discothèques) UMIH Guadeloupe que je préside.
Le refus des instances publiques observé jusqu’ici, maintes fois dénoncé par notre organisation
UMIH Guadeloupe, de co-oeuvrer avec les professionnels des industries touristiques, est
regrettable sur de nombreux aspects. Ce refus continue, d’une co-construction des politiques de
développement de l’emploi dans les industries touristiques, aurait dû et devrait associer les élus
et les véritables opérateurs professionnels (c’est-à-dire ceux qui réalisent et prennent les risques
d’investissements lourds non délocalisables, et ceux qui reçoivent des clients payant les
prestations proposées) en vue de développer largement l’emploi local dans les industries
touristiques.
Nous déplorons, faute de concertation, que :
Sur Pointe-à-Pitre, un foncier spécifique adapté à la réalisation d’une marina, a été dédié à des
HLM qui auraient pu être implantés à quelque proximité sans réduire ni pénaliser une potentialité
économique créatrice d’emplois, et que le foncier mitoyen au « Memorial Act » ne soit pas valorisé
pour apporter comme il serait souhaitable une plus-value à l’exploitation de ce dernier par une
meilleure utilisation de ses structures de services (salles de réunion et de restauration).
Sur GOSIER, vous ne citiez pas la décrépitude de l’hôtel Callinago qui aurait pu permettre
l’émergence au milieu des hébergements professionnels d’un véritable palais des congrès qui fait
défaut à la Guadeloupe.
Sur Sainte-Anne, le refus de faire évoluer le PLU pour permettre l’émergence de structures
touristiques complémentaires et proches de Pierre et Vacances a pénalisé le parachèvement du
site dont vous soulignez les difficultés et par voie de conséquence a empêché le soutien structurel
dont aurait pu profiter cette structure pour consolider ses emplois.
En matière d’industries touristiques, l’excès de concentration est nuisible, mais tout autant que
l’insuffisance de concentration, ou de concurrence. Le succès passe par un bon équilibre, évolutif,
mesuré, maîtrisé et justifié par les professionnels, et dépendant naturellement de la situation
géographique, du marché, et des choix politiques.
Sur Saint François, il est omniprésent dans l’analyse de tout économiste et professionnel
compétent, qu’un des plus beaux sites fonciers de Guadeloupe, celui de l’ex hôtel du Méridien et
son environnement, n’a pas été traité avec la compétence indispensable quand on est vraiment
soucieux du développement économique et de ses emplois locaux.
Il est à souhaiter que pareilles erreurs ne se renouvellent plus, et que l’on ne transforme pas
demain, plus par idéologie obstinée que par affectation appropriée, un foncier situé en bord de
mer attractif avec vue sur l’îlet du Gosier, en parkings de surface pourtant réalisables plus
opportunément à proximité et de manière plus appropriée, pour laisser toute latitude à la
valorisation d’un foncier exceptionnel… apportant encore plus d’attractivité à l’environnement du
parc de calvaire.
4) Vous avez déclaré : Il est important, en tant que Président de la SEM Patrimoniale de contribuer à
récupérer l’outil touristique qu’est l’hôtel « Pierre et Vacances ».
Permettez-nous de préciser que l’hôtel « Pierre et Vacances » est un ensemble de quelques 500
chambres (à l’époque où il était adhérent au Groupement Hôtelier et Touristique Guadeloupéen
devenu depuis l’UMIH Guadeloupe). Le montage financier de « Pierre et Vacances » a consisté à
vendre en défiscalisation à des investisseurs, des chambres hôtelières tout en les assurant d’un
loyer garanti. C’est précisément, - tout comme pour le Salako que vous nommez, (en réalité la Sté
hôtelière du Salako gestionnaire devant s’acquitter de loyers auprès de la SEMPAT) - que Pierre et
Vacances a rencontré des difficultés à honorer ses loyers du fait de la crise sanitaire prolongée,
assortie de contraintes administratives dissuasives pour les visiteurs exogènes.
Lorsque vous dites que la SEMPAT « s’engage à récupérer l’outil touristique qu’est l’hôtel « Pierre
et Vacances » qui allait être vendu à la découpe et que la SEM patrimoniale rachète la structure
pour la remettre en gestion à Pierre et Vacances et que se sont 150 emplois qui sont préservés en
phase directe », pouvez-vous nous préciser :
o Qu’est-ce que « rachète » exactement la SEMPAT ? Les chambres des investisseurs privés qui
ne percevant plus leurs loyers les mettent en vente, les parties communes ? et sur quelles
bases de prix au m2 foncier et m2 construit ? Est-ce un bon investissement à partir de deniers
publics ? Quel est le temps de retour sur investissement ?
o Vous citez 150 emplois directs pour 500 chambres. Le ratio hôtelier est, suivant l’activité de
l’établissement de 0,33 à 1 emploi par chambre, nous sommes donc dans le ratio milieu de
gamme deux à trois étoiles administratives avec 1 emploi pour 3 chambres d’une surface de
celles de Pierre et Vacances.
o Que la SEMPAT investisse de l’argent public dans le secteur privé peut conduire à une
distorsion de concurrence et à une concurrence déloyale par rapport aux autres
hébergements professionnels. Cela revient à subventionner avec de l’argent public certaines
entreprises et pas d’autres : l’enfer est pavé de bonnes intentions, et il est possible que pour
sauver 150 emplois directs, l’opération en condamne d’autres plus nombreux, à moins que …
o La stratégie régionale ait choisi, sans l’annoncer explicitement, d’aller vers une sorte de
nationalisation locale de l’hôtellerie ?
o Sachez que de nombreuses structures hôtelières sont en difficulté en Guadeloupe dans un
contexte de concurrence juridique, fiscal et réglementaire en leur défaveur.
La concurrence des hébergeurs professionnels qui eux sont porteurs d’emplois ne collecte pas
la TVA, paye une seule contribution à l’audiovisuel public (CAP) et non une contribution pour
chaque téléviseur détenu, ne paye pas de CVAE, de CFE, n’a pas les mêmes obligations
réglementaires (Sécurité, incendie, hygiène…), sociales et comptables. Ses contributions à la
TFB et TFNB (taxe foncière non bâtie) sont insignifiantes au regard de leurs fonciers bien plus
réduits que ceux des hôtels qui ont jardins, piscine, aires de loisirs et parkings. Leur
contribution à l’impôt sur le revenu est très réduite, tout comme leur collecte des taxes de
séjour alors qu’ils représentent sur le marché trois fois plus de lits que les hôtels. Toutes ces
inégalités de traitement dont ne se sont guère préoccupées jusqu’à présent ceux qui
annoncent vouloir sauver les emplois locaux témoignent en réalité d’une tromperie
déclarative qui conduit peu à peu, comme vous le constatez avec quelque amertume
compréhensive, à la disparition des structures hôtelières porteuses d’emplois, au profit d’une
vente à la découpe qui conduit à la mise sur le marché concurrentiel de plus en plus de
meublés de tourisme très peu porteurs d’emplois.
Nous sommes favorables à l’existence du produit meublés touristiques, car il correspond à un
besoin d’un segment du marché. Cependant nous sommes pour une concurrence loyale et
non faussée par des réglementations incohérente appliquées aux diverses catégories
d’hébergement, ce qui nuit à l’équilibre du marché, et donc à l’emploi, en particulier local.
Favoriser les meublés de tourisme au détriment des hôtels : pourquoi pas, si la stratégie
régionale est d’aider les autochtones les plus aisés, qui en complément de subventions
régionales ont pu investir dans des meublés de tourisme, plutôt que de soutenir les structures
porteuses d’emplois locaux ? Mais il faut mettre en lumière ces antagonismes sans se défiler.
o Si la SEMPAT a la volonté, comme vous l’avez déclaré, d’acquérir les établissements hôteliers
privés pour protéger les emplois momentanément existants, nous vous demandons, de
respecter la transparence, et de nous informer des conditions d’acquisition que la SEMPAT
pratique pour que nous puissions les communiquer à tous nos adhérents. En retour, nous ne
manquerons pas de vous faire connaître les établissements qui accepteraient de céder leurs
murs, ou murs et fonds, à la SEMPAT, dans les mêmes conditions financières.
o De la même manière, l’UMIH Guadeloupe souhaiterait connaître avec précision le nom de
l’établissement bancaire qui a financé cette opération de rachat des différentes composantes
de l’établissement guadeloupéen géré par la société PIERRE ET VACANCES, ainsi que les
conditions du ou des prêts consentis à la SEMPAT. Ainsi que les conditions financières du réétalement
éventuel de l’emprunt souscrit par la SEMPAT pour le financement de l’acquisition
des murs de l’ex hôtel Karibéa de 270 chambres, constitué des hôtels Clipper – Salako – Prao,
ainsi que le capital restant dû sur cette opération.
5) De nombreuses enseignes hôtelières ont jusqu’ici jeté l’éponge en Guadeloupe, et pour ne citer
que les deux dernières, Méridien et Accor. D’autres grandes enseignes investissent et s’installent
régulièrement dans la Caraïbe, mais aucune dans les Antilles Françaises.
N’y aurait-il pas une raison selon -vous, M. le Président de la SEMPAT ? Et qu’envisagent les
gestionnaires publics locaux pour y porter remède ?
Car la SEMPAT, soucieuse d’une saine gestion, ne devrait-elle pas engager la dépense publique
que pour des activités durables ?
Et ne sont durables que les activités créatrices d’une richesse suffisante pour rémunérer les
emplois locaux.
L’augmentation de la fréquentation touristique doit viser à augmenter la fréquentation des
établissements porteurs d’emplois et collecteurs de recettes fiscales, et non à mettre en péril ces
établissements au profit des locations meublées non enregistrées au registre du commerce et des
sociétés, peu ou pas porteuses, et ne contribuant pas, ou très peu, à l’amélioration de recettes
fiscales permettant des investissements profitant au plus grand nombre.
La fréquentation touristique en elle-même, si elle n’est pas génératrice d’emplois, et donc de
chiffre d’affaires permettant de financer ces emplois, constitue un coût pour la collectivité dont
l’intérêt est très discutable, voire contestable.
A cet égard, soulignons une fois de plus, s’il en était besoin, que l’expression archaïque «
fréquentation touristique » doit viser à mieux cerner la typologie des visiteurs ou des
consommateurs de loisirs.
Car l’évolution des besoins des populations des pays développés fait que la population locale est
en réalité beaucoup plus consommatrice, en volume, des loisirs locaux que la population des
visiteurs extérieurs. Il y a donc les consommateurs endogènes de loisirs et d’équipements et des
consommateurs exogènes. Les premiers sont les consommateurs les plus fréquents, et les moins
dépensiers ; les seconds sont les consommateurs les moins fréquents et les plus dépensiers.
Observons encore que l’usage de mots soulignant les cantonades à la mode (durable, vert, bleu,
etc …) est rarement sous-tendu par des objectifs chiffrés et programmés dans le temps et que
beaucoup trop de personnes se contentent d’invocations (comme « montée en gamme ») qui
tiennent plus de voeux souvent irréalistes, qu’à des objectifs pesés et mesurés accompagnés de
propositions opérationnelles d’un « comment faire » réaliste assorti d’une programmation
calendaire.
On aurait tort de considérer que les équipements et événements de loisirs ont vocation à satisfaire
les besoins exclusifs des consommateurs exogènes. Ils doivent satisfaire à la fois les
consommateurs endogènes et exogènes, car les plus grands bénéficiaires sont les consommateurs
endogènes, donc la population locale. Les équipements et événements de loisirs, doivent donc
d’une part contribuer à la qualité de vie de la population locale et d’autre part satisfaire la
demande des consommateurs exogènes qui par leurs dépenses importantes vont générer de
l’emploi local.
6) Concernant l’Hôtel Saint Georges à Saint Claude auquel vous faites référence, nous reconnaissons
qu’il a été admirablement rénové avec des fonds publics, et nous souhaitons particulièrement sa
réussite, non seulement parce qu’il est adhérent à notre association, mais aussi parce que nous
sommes pour la diversification territoriale des activités touristiques et économiques. Cependant,
là aussi, nous sommes contraints de constater qu’il n’y a eu aucune concertation avec notre
organisation professionnelle la plus représentative de Guadeloupe, aucune information des
membres du CESER, pas plus qu’il n’a été justifié des investissements réalisés au regard du retour
sur investissement, comme il aurait été souhaitable que cela soit fait quand on est soucieux,
comme vous le dites « d’être attachés avec les partenaires sociaux, à les consulter, les rencontrer,
pour communiquer avec eux ». C’est-on posé la question de savoir pourquoi le Saint Georges
antérieur avait cessé son activité, si l’activité de l’école hôtelière en était une cause, et si sa remise
en exploitation lui assurait de ne pas revivre la situation antérieure ?
7) C’est-on attaché dans tous les investissements de la SEMPAT à rationnaliser la dépense publique
et surtout à ne pas l’investir à perte alors que la Guadeloupe a besoin d’un plan de
développement territorial et de rééquilibrage qui revitalise maints territoires comme Basse-Terre,
Marie-Galante ou encore la Désirade…
8) Ces observations étant franchement exprimées, venons-en sérieusement au fond des choses. La
Guadeloupe a besoin d’un tourisme exogène. Selon le Comité Régional du Tourisme, les
consommateurs de produits touristiques auraient dépensé en 2019 un Milliard d’€, et selon M. Le
Président de la Chambre de Commerce et d’Industrie des Iles de Guadeloupe (CCI-IG) les pertes
de recettes 2020-2021 conséquences en particulier des mesures administratives découlant de la
crise sanitaire seraient du même ordre, de 1 Mds d’€, ce qui n’est pas négligeable vis-à-vis des
activités induites par une économie de ruissellement.
9) Notre organisation est soucieuse d’un développement sain, réfléchi, consensuel de notre territoire
Guadeloupe, car pour nous, chaque territoire correspond à un aéroport international. Nous
désapprouvons ce constat navrant de dépenses publicitaires locales contreproductives qui
conduisent à attirer des visiteurs hexagonaux en Nouvelle Aquitaine au détriment de la Bretagne,
du Centre Val de Loire, du Limousin ou de la Picardie : cela n’a pas plus de sens que d’enlever des
clients potentiels au Nord Grande-Terre, au Sud Basse-Terre, au profit de la CARL ou de telle ou
telle circonscription. L’objectif devrait être d’attirer des devises exogènes de l’international sur le
territoire et non de cultiver une concurrence interne coûteuse plutôt stérile au plan
Guadeloupéen. Je vous accorde que ce sujet mérite une révision structurelle indispensable du
management touristique dans son ensemble et une révision de l’attribution des compétences
actuelles.
Voici, M. Le Président de la SEMPAT, les observations que nous inspirent votre intervention du
29/09/2021 sur Canal 10 à l’issue de la plénière régionale.
Puissent nos propos être féconds et favorables à une coopération effective nouvelle en faveur de la
Guadeloupe, en toute transparence, et dans le respect des égalités de traitement.
L’UMIH Guadeloupe ne fait pas un procès d’intention, au contraire, mais tenait à rappeler que les
industries touristiques sont une industrie lourde, à faible rentabilité, que les erreurs d’appréciation
sont difficilement rattrapables, et se payent sur le long terme. Vous êtes, M. le Président, aux
manettes depuis peu, et vous ne pouvez être comptable des erreurs du passé. Vous mesurez
probablement que le temps passe très vite, et que l’inertie des structures administratives ou
institutionnelles est très pénalisante. Pour notre part, nous agissons le plus possible en transparence
et en concertation avec l’ensemble des acteurs, car les difficultés à surmonter sont complexes et le
travail collectif produit le plus souvent un meilleur résultat. Et nous ne saurions trop vous encourager
à agir dès que possible sur l’évolution des structures administratives ou institutionnelles, pour
permettre une expression collective (associant véritablement, durablement et équitablement les
professionnels élus, et non choisis) orientée vers un réel travail des dossiers et une action publique
efficace à long terme.
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